Nous poursuivons la publication des vidéos de la journée commémorant le 50ème anniversaire du congrès de l’UNESCO « Le soleil au service de l’Homme ». La journée s’est déroulée le 12 décembre 2023 au Collège de France.
Aujourd’hui nous publions l’intervention de Sylvain Waserman, président de l’Ademe, agence de la transition énergétique
« Mesdames et Messieurs, c’est un grand plaisir d’être là aujourd’hui avec vous. D’abord parce que le Collège de France est un endroit prestigieux. J’étais ici le mois dernier pour parler de finances vertes, donc je suis très heureux d’y revenir. Et puis, parce que finalement dans cette salle, il y a quand même pas mal de gens qui ont lancé l’aventure de l’énergie solaire en France, et donc, il faut toujours se rappeler que le présent c’est le résultat de toutes les actions qu’il y a eu avant et qui ont permis de lancer tout ça. Je crois que c’est le premier mot que je voudrais avoir pour toutes celles et tous ceux, dans leurs métiers respectifs, dans leurs convictions respectives, dans leurs engagements respectifs, en particulier à l’ADEME mais bien plus largement, qui ont contribué à faire de l’énergie solaire (et du soleil), ce qu’elle est aujourd’hui. Donc, soyez-en remerciés. Je voulais commencer par cela.
Tout a été dit ce matin sur l’histoire, donc je vais passer sur la note qui m’avait été préparée sur l’histoire, et aller directement à la suite. Je remercie quand même mes services de me l’avoir préparée consciencieusement. Je voulais partager avec vous quelques éléments pour vous dire combien l’énergie solaire est au cœur de beaucoup de défis et de quelques paradoxes.
Le monde de la transition écologique a changé et je suis très heureux d’arriver à l’ADEME à un moment précis où, depuis un peu moins d’un an, on a un objectif chiffré. La France, c’est 400 millions de tonnes de carbone (CO2 ndlr) aujourd’hui avec un point de passage en 2030 de 270 millions de tonnes pour pouvoir atteindre la décarbonation en 2050. On a donc 7 ans pour trouver 138 millions de tonnes de carbone. 7 ans pour trouver 138 millions de tonnes. Cela change tout parce que maintenant on a un objectif chiffré permettant d’avoir des indicateurs pour chaque projet et voir à quel titre il contribue à l’objectif global. Bref on a une démarche que, dans le monde de l’entreprise mais dans beaucoup d’univers, on aime bien. Celui d’avoir un objectif chiffré pour pouvoir mesurer sa performance au regard de l’atteinte de cet objectif. C’est une nouvelle ère de la transition écologique, beaucoup plus orientée sur les plan d’action, l’analyse et le résultat, parce qu’évidemment aujourd’hui il y a une urgence et une exigence de résultat.
Il se trouve que l’énergie solaire a plus que jamais toute sa place dans ces 138 millions de tonnes à aller trouver. D’abord bien sûr parce que la biomasse et la photosynthèse sont évidemment des puits de captage de carbone naturels et gratuits qu’il faut favoriser. Et ça c’est quand même grâce au soleil, ça pèse quand même 10 millions de tonnes sur les 138 millions. Ensuite parce que le photovoltaïque est en très forte croissance sur la partie production électrique. Cela va peser entre 5 et 10 millions de tonnes en fonction de de la rapidité et de l’essor des prochaines années. Mais aussi parce que le solaire thermique est en très forte croissance, notamment pour les besoins industriels.
J’étais vendredi dernier à l’inauguration, à Verdun, de la plus grande installation solaire thermique de France, la deuxième d’Europe. Son objectif, c’est bien d’aider le processus industriel, en l’occurrence du groupe Lactalis pour pouvoir le décarboner, et se substituer à du gaz naturel. Donc l’énergie solaire, qu’elle soit électrique, qu’elle soit thermique, a toute sa place dans ces 138 millions de tonnes qu’il faut aller trouver. Maintenant notre défi commun, c’est de l’amener le plus loin possible pour contribuer de la façon la plus majeure possible à cet objectif donc au cœur de la transition écologique.
Au cœur aussi des notions de souveraineté et je vais partager avec vous un paradoxe auquel je réfléchissais en en préparant ces quelques éléments. C’est que le solaire, c’est à la fois peut-être l’énergie la plus lointaine et la plus proche. La plus lointaine parce que le soleil c’est quand même à 149 millions 597 870 kilomètres – 870, 871 enfin bon ! Mais en fait il est étonnant de voir que c’est la plus proche. Que c’est celle qui est accessible à tous. Que les modèles d’autoconsommation aujourd’hui redistribuent complètement les modèles énergétiques, avec y compris des citoyens qui s’emparent du sujet, des logiques d’autoconsommation qui rapprochent la production de la consommation en circuit court. Bref une évolution, parce qu’elle est accessible, à chaque citoyen, chaque groupe, groupement, de citoyens, donc la plus éloignée et la plus proche à la fois. C’est pour le moins un paradoxe intéressant. D’autant plus que la semaine dernière je rencontrais les acteurs d’Energie partagée. Vous savez, ce sont ces acteurs associatifs qui essayent d’engager, d’embarquer les citoyens, dans les projets d’énergie renouvelable. C’est bien sûr le solaire qui est en numéro 1. C’est la plus directement accessible et celle qui peut générer le plus de dynamique pour cette raison de proximité.
Le deuxième point, c’est que c’est une énergie à la fois la plus ancienne et la plus moderne. La plus ancienne parce que c’est quand même depuis 4-4,5 milliards d’années que le soleil existe, mais la plus moderne parce qu’il est étonnant de voir, et ça je le découvre depuis que je suis à l’ADEME, la vivacité des innovations dans le domaine de l’énergie solaire, thermique ou électrique. On a 150 chercheurs à l’ADEME qui s’investissent dans des thématiques de pointe, dont on espère qu’elles pourront aboutir sur une accélération de la transition écologique. Mais j’avais déjà été frappé par cela, à l’époque de Solar Impulse, quand Bertrand Piccard nous montrait l’extraordinaire tour du monde qu’il avait fait en avion solaire. C’est quand même bluffant. Et puis l’écouter parler de ça, c’est quand même très inspirant. On parle aussi des ordinateurs quantiques et de l’utilisation des photons. On a dérivé toute une partie de la science à la pointe de la recherche, sur le soleil, sur les photons, et sur l’énergie qu’il porte.
En fait l’énergie solaire, aujourd’hui, est au cœur des enjeux géopolitiques du monde. Au cœur des enjeux géopolitiques du monde. On parle en même temps que la COP aboutira, ou pas, sur un accord de sortie des énergies fossiles, dans des pays parmi les plus ensoleillés au monde, qui aujourd’hui, comme l’Arabie Saoudite, sont à la fois ancrés dans la manne pétrolière, et ont du mal à s’en défaire, et à la fois très volontaristes sur les énergies solaires avec leurs nouveaux projets, évidemment très adaptés à leurs conditions géographique et climatique. Mais aussi au cœur des enjeux politiques et géopolitiques avec la Chine. On dit de la Chine que c’est le plus gros pollueur de la planète. Il ne faut pas oublier que la Chine c’est quand même autant de panneaux solaire installés, qui produisent de l’électricité en Chine, que partout ailleurs dans le monde. Avec des Chinois qui, certes, sont très pollueurs, mais qui vont très vite et pèsent déjà autant en énergie photovoltaïque que tout le reste du monde réuni.
Cela pose la question de notre souveraineté, notre capacité à saisir les enjeux d’une énergie comme l’énergie solaire, non pas tant uniquement sur la production de l’énergie elle-même, mais sur toute la chaîne de valeur. J’ai échangé avec l’entreprise Viessmann tout à l’heure, qui me rappelait que la France était exportatrice nette de panneaux solaires thermiques, ce que je ne savais pas, grâce notamment à leur usine dans le Grand Est à Faulquemont. Mais je crois que c’est aujourd’hui, dans ces éléments géopolitiques, que s’illustre parfaitement la complexité du monde. Hier, j’étais à Toulouse lorsque le Président de la République présentait le programme France 2030 et l’ensemble des actions qu’il mène. Le sujet du solaire est arrivé sous l’angle de la souveraineté avec notamment la question des minéraux rares pour laquelle la France se lance dans une véritable cartographie pour essayer de saisir les opportunités qu’elle a dans ce domaine. Le solaire aussi pose la question de notre dépendance pour la production des panneaux notamment sur des chaînes de valeur amont. Donc au cœur de tous les enjeux géopolitiques auxquels on est confronté.
Voilà alors je ne sais pas si je vais pouvoir illuminer vos travaux. Je sais que ce matin vous avez des sessions passionnantes, des tables rondes avec plein d’experts de l’ADEME qui, soit ont travaillé à l’ADEME, soit y sont toujours et qui interviennent dans ces tables rondes. Je voudrais conclure en disant que, comme tout bon potache, avant de venir ici, et pour préparer mon discours, j’ai essayé Chat GPT pour voir ce qu’il me disait. Alors j’ai tapé « Collège de France » et j’ai mis pour thème « le soleil au service de l’humanité ». La phrase la moins pire que j’ai trouvé, c’est quand même que « le soleil éclaire nos journées et illumine notre avenir ».
Donc je vous laisserai avec ces pensées de Chat GPT, sur ces paroles de l’intelligence artificielle, pour vous souhaiter de très bons travaux et vous remercier, non seulement d’être là aujourd’hui pour parler d’un sujet aussi important, mais aussi, encore une fois pour tous ceux qui ont contribué à faire de l’énergie solaire ce qu’elle est aujourd’hui. Merci beaucoup. »
Les participants à la conférence du Collège de France lancent un « Appel à agir ensemble » qu’ils vous invitent à signer et à faire signer.
Voici le texte de l’Appel
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