L’Assemblée rejette la loi Gremillet : un moratoire controversé sur les énergies renouvelables

Le 24 juin 2025, l’Assemblée nationale a rejeté par 377 voix contre 142 la proposition de loi dite « Gremillet », remaniée en commission par les députés LR et RN. Ce texte, qui avait pour ambition de servir de cadre à la future programmation pluriannuelle de l’énergie (PPE), instaure notamment un moratoire sur les projets photovoltaïques et éoliens, relance le nucléaire et modifie les dispositions sur les biocarburants.

Contexte et objectifs initiaux

Initialement portée par le sénateur Daniel Gremillet (LR), la loi visait à lancer un débat parlementaire sur la trajectoire énergétique à l’horizon 2035, en amont du décret PPE attendu cet été. Son ambition était de définir un cap clair pour atteindre la neutralité carbone en 2050, tout en maintenant un équilibre entre nucléaire et énergies renouvelables.

Modifications polémiques lors de l’examen à l’Assemblée

  • Moratoire sur l’éolien et le photovoltaïque : un amendement LR, soutenu par le RN, suspend tout nouveau projet d’installation, quel que soit son état d’avancement.
  • Relance du nucléaire : le texte revient sur la fermeture de Fessenheim et affirme la nécessité d’un redéploiement rapide du parc nucléaire.
  • Suppression des objectifs sur les biocarburants : les engagements liés aux carburants issus de la biomasse ont été retirés, malgré leur importance pour décarboner les transports.
  • Réintroduction du tarif régulé du gaz : une disposition jugée protectionniste et en décalage avec les réalités du marché européen de l’énergie.

Réactions et critiques

Critiques des élus

  • Les groupes de gauche et le bloc présidentiel ont vivement dénoncé un virage « anti-écologie ». Le Premier ministre Gabriel Attal a qualifié l’ensemble de « dangereux pour le climat et pour les Français ».
  • Le ministre de l’Industrie Marc Ferracci a dénoncé une « catastrophe économique », pointant les milliers d’emplois menacés dans les filières solaires et éoliennes.
  • Le Syndicat des énergies renouvelables (SER) estime que ce moratoire bloque 50 GW de projets en cours et met en péril plus de 80 000 emplois directs.

Position du RN et de LR

  • Jean‑Philippe Tanguy (RN) défend la suspension des projets comme un « signal de bon sens » face aux contestations locales et aux doutes sur la rentabilité des ENR.
  • Les Républicains, bien qu’ayant soutenu les amendements, se sont finalement abstenus au moment du vote final, invoquant une volonté de ne pas valider les « extrêmes » des deux bords.

Conséquences à court et moyen terme

Navette parlementaire

Le texte retournera au Sénat début juillet, où la droite est majoritaire. Une commission mixte paritaire (CMP) est prévue pour tenter de concilier les versions du Sénat et de l’Assemblée.

Décision gouvernementale

Le gouvernement a indiqué que le décret PPE ne sera publié qu’après la fin du parcours parlementaire. Des voix s’élèvent pour dénoncer un risque de publication en période creuse, comme en plein été, pour éviter les réactions politiques.

Impact énergétique et climatique

  • Le moratoire freinerait fortement la croissance des énergies renouvelables, essentielles pour atteindre les objectifs climatiques de la France.
  • Le nucléaire, bien que stratégique, ne pourra pas produire de nouveaux réacteurs avant 2038, laissant un vide difficilement comblable.
  • Les acteurs du secteur craignent un désengagement des investisseurs et la perte d’un leadership technologique français.

Enjeux majeurs à suivre

  1. Issue de la CMP : un compromis législatif est essentiel pour garantir une politique énergétique cohérente.
  2. Publication du décret PPE : le contenu du décret définira la stratégie de la France pour les dix prochaines années.
  3. Mobilisation citoyenne et professionnelle : les syndicats, les ONG et les collectivités locales pourraient se mobiliser pour faire pression.
  4. Conséquences électorales : cette fracture sur l’énergie annonce une polarisation accrue lors des prochains scrutins.

Le rejet de la loi Gremillet illustre les tensions profondes autour du modèle énergétique français. En opposant les tenants du nucléaire renforcé aux partisans d’un mix 100 % renouvelable, ce vote révèle un choix stratégique fondamental pour l’avenir climatique, industriel et social du pays. La suite dépendra autant des arbitrages politiques que de la capacité du secteur à maintenir ses ambitions dans un contexte incertain.

Regarder ces vidéos vous offrira un éclairage complémentaire, entre le volet renouvelables et le choix nucléaire, pour mieux comprendre les implications de la loi Gremillet.

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