Fin de l’arenh en 2026 : pourquoi les factures d’électricité ne baisseront pas

Alors que les prix de gros de l’électricité reculent sur les marchés européens, une analyse de l’entreprise Hello Watt publiée en décembre 2025 vient tempérer les espoirs d’une baisse significative des factures pour les consommateurs français. La raison principale avancée ? La suppression programmée de l’Accès régulé à l’électricité nucléaire historique (ARENH) au 1er janvier 2026. Ce mécanisme-clé du marché français de l’énergie a longtemps servi d’amortisseur tarifaire. Sa disparition, selon l’expert, neutralisera l’effet bénéfique de la baisse des cours, privant les ménages d’une économie substantielle.

Le mécanisme de l’arenh et son rôle de bouclier tarifaire

Instauré en 2011, l’ARENH était un dispositif unique permettant aux fournisseurs d’électricité alternatifs (et à EDF pour ses clients hors tarif réglementé) d’acheter une partie de la production nucléaire historique d’EDF à un prix régulé, fixé à 42 €/MWh. Ce volume, plafonné à environ 100 TWh par an, couvrait traditionnellement plus de la moitié de l’approvisionnement d’un client au tarif réglementé de vente (TRV). Le reste était acheté au prix du marché de gros. Ce système hybride permettait de lisser l’impact de la volatilité des marchés sur la facture finale du consommateur.

Une baisse de 9 % sur le kilowattheure qui s’évapore

Les calculs de Hello Watt sont éloquents. Selon leur analyse, si l’ARENH était maintenu en 2026, la baisse actuelle des prix de gros permettrait une réduction d’environ 9 % du prix hors taxes du kilowattheure au TRV. Cela se traduirait par une diminution moyenne de 6 % sur la facture totale d’un foyer. Cependant, avec la fin du dispositif, l’approvisionnement des fournisseurs dépendra intégralement du marché spot et des contrats à terme, dont le prix moyen de référence pour 2026 est estimé à 64,3 €/MWh par la Commission de régulation de l’énergie (CRE). La baisse des cours ne compensera donc que la disparition de l’avantage nucléaire historique, conduisant à une simple stabilisation annoncée des tarifs, et non à une baisse.

Une stabilité trompeuse et la perte d’une protection essentielle

La CRE a effectivement annoncé une stabilité des tarifs réglementés pour début 2026. Hello Watt qualifie cette annonce de « trompeuse » dans le contexte de marché. Elle masque le fait que les consommateurs ne bénéficieront pas de la décrue des prix de gros, laquelle est entièrement absorbée par la fin de l’ARENH.

L’entreprise souligne surtout le rôle protecteur crucial qu’a joué ce mécanisme lors des crises récentes. Par exemple, si l’ARENH avait disparu au 1er janvier 2025, période où les prix de gros avoisinaient les 103 €/MWh, les tarifs réglementés auraient connu une hausse brutale au lieu de la baisse enregistrée. « Avec la fin de l’ARENH, le consommateur perd sur les deux tableaux », alerte Sylvain Le Falher, cofondateur de Hello Watt. « Non seulement il ne profite pas de la baisse actuelle des marchés, mais il se retrouve sans protection face aux futures crises. »

Un enjeu social majeur dans un contexte de précarité énergétique

Cette réforme intervient à un moment critique. Le dernier baromètre du Médiateur national de l’énergie révèle que la précarité énergétique reste une réalité aiguë : trois quarts des Français restreignent leur chauffage pour limiter leurs dépenses, et plus d’un tiers ont souffert du froid chez eux durant l’hiver précédent. La fin de cet amortisseur tarifaire risque donc d’accentuer les difficultés pour les ménages les plus vulnérables.

Par ailleurs, Hello Watt analyse cette réforme comme un transfert financier au bénéfice d’EDF, visant à renforcer la capacité d’investissement du groupe public dans le nouveau programme nucléaire et la maintenance du parc existant. Le nouveau mécanisme de redistribution prévu au-delà d’un seuil de 78 €/MWh (dit « contrat différencié complémentaire ») est jugé peu opérant dans les conditions de marché actuelles, offrant une perspective de compensation lointaine et incertaine pour les consommateurs.

Quelles solutions pour les consommateurs face à un marché plus volatil ?

Dans un système désormais entièrement indexé sur les marchés de gros, les consommateurs doivent devenir acteurs de leur consommation et de leurs contrats. Hello Watt recommande plusieurs leviers pour atténuer l’impact de cette réforme :

• Comparer activement les offres du marché : Le tarif réglementé disparaissant progressivement, il est crucial de comparer les offres des fournisseurs (prix, type d’indexation, services).
• Réduire sa consommation : Adopter des éco-gestes et suivre sa consommation via des outils de suivi.
• Investir dans l’efficacité énergétique : Améliorer l’isolation du logement et remplacer les systèmes de chauffage énergivores.
• Envisager l’autoconsommation : L’installation de panneaux solaires peut constituer un bouclier de long terme contre la volatilité des prix.

La fin de l’ARENH marque un tournant structurel pour le marché français de l’électricité. Elle expose pleinement les consommateurs aux fluctuations des marchés internationaux et rend plus que jamais nécessaire une démarche active de maîtrise de sa consommation et de ses choix énergétiques.