Philippe Chartier nous a quitté samedi 1er juin à l’âge de 86 ans. Jean-Louis Bal, un de ses nombreux compagnons de route lui rend hommage :
« J’ai eu l’immense privilège de collaborer par deux fois durant de longues années avec Philippe Chartier. La première fois, c’était à la création de l’ADEME dont Philippe était le Directeur Scientifique, la seconde fois au Syndicat des Energies Renouvelables (SER) où Il était conseiller du Président, notamment pour la promotion des énergies renouvelables dans la réglementation des constructions neuves. Ce qui marque son parcours c’est sa continuité sur le thème de l’énergie depuis le premier choc pétrolier jusqu’à la problématique énergie climat depuis le début des années quatre-vingt-dix. De la biomasse, au projet Alter, à l’AFME devenue l’ADEME, puis au SER, Philippe a fait avancer la réflexion et les actions en faveur des énergies renouvelables.
Si on y ajoute son travail antérieur au sein du département de bioclimatologie de l’INRA sur les échanges de CO2 entre les couverts végétaux cultivés et les basses couches de l’atmosphère qui s’inscrivent bien dans le registre du changement climatique, c’est l’ensemble de ses activités professionnelles qui relèvent de cette continuité. Le tout avec une ligne directrice bien marquée par l’icône schématique du projet Négawatt, version actuelle la plus proche du projet Alter : sobriété, efficacité et énergie renouvelable. Le projet Alter, édité par le groupe de Bellevue, dont faisait partie Philippe, esquissait pour la première fois en 1978 un avenir énergétique pour la France axé sur le potentiel renouvelable. Dans le contexte de l’époque, c’est peu de dire qu’il fallait être visionnaire pour envisager un avenir 100% renouvelable pour notre pays. Les coûts des EnR étaient de 20 à 100 fois plus élevés que ceux que nous connaissons aujourd’hui.
Au cours de ses 20 ans à la Direction Scientifique de l’AFME et de l’ADEME, Philippe a maintenu un puissant soutien au développement des énergies renouvelables, y compris après le contre-choc pétrolier de 1986 qui les faisaient apparaître comme non prioritaires. Si en 2024, la recherche française en photovoltaïque est à la pointe, c’est bien parce que l’ADEME, sous l’impulsion de Philippe, a maintenu son effort financier en faveur des différents laboratoires du CNRS et à Photowatt. Sans lui, Photowatt n’existerait plus depuis longtemps et l’INES et l’IPVF n’auraient jamais vu le jour.
Au SER il a assuré l’introduction du photovoltaïque dans les filières éligibles au tarif d’achat et aux appels d’offre (entre 2000 et 2010) et s’est ensuite concentré sur les filières renouvelables inscrites dans les réglementations thermiques puis environnementales des constructions neuves et existantes (entre 2010 et 2018). Philippe a imprimé sa marque sur les réglementations RT 2005, RT 2012 et RE 2020. Il n’a pas toujours été écouté par les pouvoirs publics, mais la quasi-totalité des dispositions favorables aux EnR (solaire PV et thermique, bois énergie ou pompes à chaleur) sont issues de ses propositions.
Outre ses capacités d’analyse hors du commun et sa culture énergétique et environnementale qui lui permettait une vision systémique, Philippe était doué d’une grande force pédagogique et d’une intransigeance avec les principes qui le guidaient depuis les années 1970.
Mais, il était surtout un homme d’un grand charisme qui, malgré sa vivacité intellectuelle, savait se mettre au niveau de ses interlocuteurs. Tant à l’ADEME qu’au SER, mais aussi auprès de la Fondation Bâtiment Energie ou de l’Association Effinergie, il était unanimement apprécié pour ses qualités humaines et sa convivialité.
Maintenant qu’il a rejoint sa chère épouse Simone, il doit savoir à quel point il va nous manquer et je pense avec beaucoup d’affection à toute sa famille. »
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