A l’occasion de la commémoration du cinquantième anniversaire du congrès qui s’est tenu à l’UNESCO en 1973 et qui marque le début de l’ère moderne de l’énergie solaire, Alain Liébard, un des congressiste se souvient lors d’une conversation avec Daniel Lincot. Alain Liébard, architecte, est l’ancien président d’Observ’ER et le président-fondateur de la Fondation Energie pour le Monde (FONDEM)
Partie 1 Introduction au Congrès
« C’était dans les années 72 j’avais rejoint l’école d’architecture de la rue Bonaparte, qui s’appelait à l’époque UP6, parce qu’il y avait des enseignants qui m’intéressaient et qui s’intéressaient eux aussi au solaire et aux applications du solaire dans les pays du Sud et ils avaient fait de plusieurs publications. C’était George et Jeanne-Marie Alexandroff, qui était peut-être plus connu sous son nom de jeune fille qui s’appelait Jeanne-Marie de Buchère.
Je les avais rejoints en tant qu’étudiant, j’avais 22 ans et à partir d’eux j’ai eu accès à différentes personnalités qui étaient déjà connues dans le monde du solaire à cette époque-là. Pas beaucoup dans le monde photovoltaïque qui était encore au stade, essentiellement, de la recherche dans les laboratoires, mais beaucoup solaire thermique et le solaire thermodynamique.
Le solaire thermique il y avait une société industrielle, qui était basé à Mont-de-Marsan, qui s’appelait la Société Générale Héliothermique qui avait été fondé après-guerre, dans les années 46-47, et puis j’ai eu aussi accès à une personne qui avait passé sa thèse qui s’appelait Jean-Pierre Girardier qui avait passé sa thèse sur le thermodynamique solaire basse température avec différents interlocuteurs africains.
Je me suis trouvé dans cette école d’architecture et quand le Congrès a été annoncé, l’école d’architecture UP6 a voulu participer à ce congrès de l’UNESCO. On était quelques étudiants et enseignants principaux a participé activement à ce congrès, c’est-à-dire qu’on a fait des préparations de maquettes à assez grande échelle qui fonctionnaient au solaire sur le parvis de l’UNESCO et puis on a fait des publications sous forme de posters qui ont été affichés dans la salle d’exposition des posters de l’UNESCO.
Pour moi à cette époque-là, l’approche était essentiellement les applications dans les pays du Sud. Dans les applications dans les pays sahéliens avec des liens comme le professeur Abdou Moumouni Dioffo qui était Président de l’ONERSOL. En assistant aux conférences je me suis rendu compte qu’il y avait d’autres personnes qui travaillaient déjà sur les applications dans l’habitat et puis il y avait finalement un assez grand nombre de laboratoires dans le monde qui avait des représentants dans ce congrès et que en fait c’était une confrérie si on peut dire. Il y avait un laboratoire très connu à Tachkent par exemple. C’était une confrérie de chercheurs qui n’avaient pas l’occasion de se rencontrer et que ce congrès était le premier congrès de l’époque moderne, permettant aux chercheurs du monde entier de se rencontrer, de faire connaissance de de visu. »
Partie 2 : Le solaire et l’habitat
« Le solaire et l’habitat était assez dominé par des communications nord-américaines, mais beaucoup canadiennes également ? Il y avait l’Institut McGill qui était très en avance sur la recherche dans l’application dans secteur de l’habitat, vu leur climat c’est-à-dire assez ensoleillé et malgré tout très froid. Il y avait toute une mouvance, que l’on pourrait qualifier de libertaire qui avait fait des réalisations grandeur nature au Canada, mais aussi aux États-Unis, au Nouveau-Mexique. De mémoire cette session était assez dominée par des interventions nordaméricaines et je ne crois pas avoir beaucoup assister à cette session, en tout cas je m’en souviens plus parce que c’est quand même très vieux, puis moi j’étais encore une fois jeune à l’époque. Je ne me rendais pas bien compte.
Autant la potentialité dans la problématique du développement des pays du Sud par l’usage l’énergie solaire sur leur territoire me paraissait absolument évidente, autant l’application dans l’habitat en France, ne m’apparaissait pas d’une grande évidence, parce que la première crise de l’énergie d’octobre 73 n’avait pas encore eu lieu, l’énergie était très bon marché, les premières réalisations solaires dans l’habitat n’avaient pas eu lien, ou très peu, enfin on n’en connaissait pas en France. Je me suis installé comme architecte à mon compte en 74 et il semble bien d’avoir été le premier ou l’un des premiers à faire des réalisations solaires concrètes en habitat. En juillet 73 cela ne m’apparaissait pas d’une grande évidence qu’on puisse faire des applications dans l’habitat en France et en Europe. »
Partie 3 Installation UNESCO & Posters
« Sur le parvis de de l’UNESCO il y a eu deux installations très différentes. Il y a eu une machine thermodynamique d’un kilowatt grandeur nature qui avait été amenée par une société qui allait devenir la SOFRETES société française d’études thermiques et d’énergie solaire et la source chaude n’était pas relié à des capteurs solaires pour les besoins de la démonstration, il fabriquait la source chaude localement avec un chauffage au gaz, la pompe solaire thermodynamique.
Nous par ailleurs les étudiants de l’École d’Architecture on avait fait une petite station solaire avec des héliostats il y avait une trentaine d’héliostat d’un quart de mètre carré qui étaient manipulés à la main par les congressistes qui étaient présents et on renvoyait 30 images du soleil sur une chaudière qui se présentait sous forme d’un radiateur d’un quart de mètre carré et on transformait l’eau, directement en vapeur d’eau sous pression. On a eu beaucoup de chance parce que pendant les 4 jours du colloque il a fait très beau et donc cette petite machine thermodynamique à concentration muni d’héliostats intéressait absolument tout le monde et les congressistes au moment des pauses venaient manipuler ces héliostats. A notre grande surprise on se rendait compte que l’image du soleil sur la chaudière même s’il y avait déjà 28 ou 29 soleils sur la chaudière, le 30ème se voyait c’est-à-dire qu’on arrivait à concentrer l’image du 30ème héliostat sur la chaudière on la voyait encore.
Sur nos posters on avait dessiné des petites centrales solaires à concentration, villageoise qui étaient reliées, en tout cas sur les posters, à des pompes thermodynamiques pour faire du pompage de l’eau. Je ne peux pas affirmer qu’en 73 Reiser avait déjà sa maison à Collioure, ça je ne m’en souviens pas, mais en tout cas le Centre Pompidou qui avait des liens avec le Château de Collioure a organisé, quelques années plus tard, une exposition de chauffe-eau solaires en sculpture. Il avait fait appel à des artistes qui avaient fait des chauffe-eau solaires en sculpture. Certains fabriquaient de la vapeur d’eau et cette vapeur d’eau sortait à travers des instruments de musique et donc faisait du bruit et quand on rentrait quand on achetait son billet pour rentrer dans cette exposition du Château de Collioure on avait le droit à deux pommes de terre qu’on mettait dans le cuiseur solaire à l’entrée et qu’on récupérait à la sortie et compte tenu de la durée de l’exposition, de la visite les patates étaient cuites. »
Partie 4 Hymne au Soleil
« Il me semble que c’est à la fin du Congrès et en fait c’est un scientifique qui s’appelait Maurice Touchet qui dans le grand amphi de l’UNESCO s’est levé et qui a entonné l’hymne au soleil. Il avait dû le préparer parce que on entendait en fond de musique sonorisé l’hymne au soleil également. Tous les congressistes se sont levés et entonnaient, même sans parole mais simplement chantait l’hymne soleil comme un gage d’avenir.
C’était un congrès joyeux, parce que c’était à cheval sur la science, sur les scientifiques, sur l’apport scientifique, et en même temps la première fois que ces scientifiques avaient tous l’occasion de se rencontrer et de prendre conscience qu’il faisait partie d’une communauté mondiale.
Il y avait des représentants africains, il y avait des représentants l’Union soviétique, des représentants de Tachkent qui était l’un des pays satellites de l’Union Soviétique l’Ouzbékistan, il y avait des représentants canadiens à travers l’université de McGill, il y avait des représentants du Colorado… tous ces gens qui travaillait de façon isolée y compris bien sûr le CNRS qui était déjà installé à Odeillo et tous ces gens, j’ai eu comme impression que ces gens travaillaient d’une façon assez isolée avec des communications, il y avait pas Internet à l’époque, donc des communications papier avec des collègues du monde entier et là c’était pour eux l’occasion de se rencontrer et de prendre conscience qu’il y avait une véritable communauté mondiale de gens qui se connaissaient mais qui pour la plupart ne s’étaient jamais rencontrés.
Mon souvenir était à la fois des communications scientifiques et en même temps extrêmement humain. Je ne crois pas qu’il y avait une véritable concurrence. En fait ces gens étaient isolés parce que la recherche sur le solaire en 1973, avant la première crise pétrolière, ce n’était pas encore véritablement un enjeu économique c’était plutôt un enjeu de persuasion. »
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