Paquet Omnibus européen : un recul historique pour la transparence climatique des entreprises

Paquet Omnibus européen : un recul historique pour la transparence climatique des entreprises

Le Parlement européen a adopté le 13 novembre le paquet Omnibus, une révision de la directive sur le reporting de développement durable qui réduit considérablement le nombre d’entreprises soumises aux obligations de transparence environnementale. Ce vote marque un tournant dans la politique climatique européenne et suscite de vives critiques parmi les défenseurs de l’environnement.

Une réduction drastique des entreprises concernées par le reporting climatique

Le paquet Omnibus modifie profondément le champ d’application de la directive CSRD (Corporate Sustainability Reporting Directive). Près de 90% des entreprises initialement concernées par la directive CSRD sortent du champ d’application, tout comme 70% de celles soumises au devoir de vigilance. Désormais, seules les entreprises de plus de 1 000 salariés et réalisant 450 millions d’euros de chiffre d’affaires devront publier leurs données extra-financières, contre des seuils précédents de 250 salariés et 40 millions d’euros.

Cette modification représente un recul significatif dans la politique climatique européenne, alors que l’Union européenne s’était positionnée comme leader mondial en matière de transparence climatique des entreprises.

Un affaiblissement de la portée extraterritoriale et de la transparence

Le texte adopté affaiblit la portée extraterritoriale du devoir de vigilance et réduit les exigences de transparence sur les chaînes de valeur mondiales. Cette décision intervient à un moment crucial où les impacts climatiques et sociaux pèsent de plus en plus sur la performance économique des entreprises.

Le vote a été soutenu par une coalition inédite allant du centre-droit à l’extrême-droite, illustrant un basculement politique vers des considérations de court terme au détriment de la transition écologique de long terme. L’Europe s’éloigne ainsi de ses propres ambitions climatiques, alors que les normes internationales (ISSB) imposent déjà ces standards de transparence dans plus de 35 pays.

Conséquences pour les entreprises et l’économie européenne

Malgré ce recul, la dynamique de transparence n’est pas totalement brisée. À partir de 2027, environ 6 000 entreprises européennes resteront soumises à un cadre extra-financier commun. Les grands groupes devront continuer à exiger des informations environnementales de leurs fournisseurs, ce qui pourrait entraîner un effet de ruissellement à travers toute la chaîne de valeur.

Cette situation place l’Europe en retrait par rapport à d’autres régions du monde qui renforcent leur législation climatique, comme le montre le règlement sur la divulgation climatique de la SEC américaine.

Réactions et perspectives d’avenir

Pour Alexis Normand, CEO et cofondateur de Greenly : « Avec Omnibus, l’Europe renonce à la souveraineté climatique qu’elle avait commencé à bâtir. Le continent qui avait fait du reporting durable une arme économique et diplomatique face aux États-Unis choisit aujourd’hui le repli. C’est une victoire des lobbies industriels et un signal catastrophique envoyé aux acteurs économiques qui investissent dans la transparence et la résilience. »

Il ajoute : « La comptabilité carbone n’est pas un exercice bureaucratique. C’est le nouveau langage de l’économie réelle, celui qui permet d’anticiper les risques physiques et financiers liés au climat. Si la politique recule, il revient aux entreprises de poursuivre la transition, sans idéologie mais avec méthode. »

Ce recul législatif intervient dans un contexte où les investisseurs et les marchés financiers réclament pourtant davantage de transparence sur les risques climatiques, comme en témoigne la croissance des standards de reporting GRI adoptés volontairement par de nombreuses entreprises.

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